“Elle avait réussi à donner un sens à ma vie en la transformant en un bordel perpétuel. Sa trajectoire était claire, elle avait mille directions, des millions d’horizons, mon rôle consistait à faire suivre l’intendance en cadence, à lui donner les moyens de vivre ses démences et de ne se préoccuper de rien.”
En attendant Bojangles, Olivier Bourdeaut
(crédit: Papermiint – Les Parenthèses)
14 février.
J’avais prévu d’écrire des jolies choses. Parce que c’est une jolie date qui mérite qu’on écrive des jolies choses. Et puis parce que cette année elle est un peu différente. Mais finalement je me suis retrouvée sans voix, sans parvenir à mettre de l’ordre dans mes pensées. Ne sachant pas très bien ou placer la frontière entre ce qu’on doit/peut dire et ce qui relève de l’intime. Parce que ce n’est pas évident de parler de ces choses là sans être niais, ou désabusé, ou même complètement partial. Mais j’ai eu envie d’essayer. Juste comme ça, de vous à moi.
J’avais envie de parler de beaucoup de choses. Des fois ou l’on m’a dit je t’aime et que j’ai répondu moi aussi, ou alors non je crois que tu te méprends, tu sais c’est mieux qu’on reste amis. Des fois où j’ai dit je t’aime aussi. Celles ou ça m’a coûté, où je me suis entraînée avant devant la glace, celles impromptues criées ou chuchotées, celles mécaniques comme on dit “éteint la lumière”.
J’avais envie de parler de tous ces moments qui ont été une ode à l’amour, ces fous rires tonitruants, ces disputes improbables ces courses effrénées dans la rue, ces retrouvailles par centaines sur les quais de gare, ces crises de jalousie, ces baisers sans fin. Cette folie un peu aussi. Parce qu’il faut être un peu fou pour aimer. Je veux dire vraiment aimer. Au point de s’oublier complètement. Au point de vivre par et pour l’autre.
Je voulais parler de quand ça ne va plus si bien aussi. Parce que ça on en parle pas souvent. Et encore moins aujourd’hui. On fait comme si. On cache la poussière sous le tapis avec des roses et du chocolat. Comme si sur un malentendu on allait remettre tous les compteurs à 0. Pourtant on nous a jamais donné le mode d’emploi. Chacun fait comme il peut, mais les compteurs ne se remettent jamais vraiment à 0.
Et puis finalement je me suis dit que j’allais parler d’autre chose. De la peur de s’attacher, de l’interdiction de s’attacher même,que beaucoup s’infligent à cause d’un vécu trop douloureux, de l’échec, de l’ego aussi souvent. Et je trouve ça d’une tristesse abyssale. Ce qui reste à la fin d’une vie, c’est le souvenir d’avoir été amoureux. D’avoir vibré. D’avoir été vivant. D’avoir passionnément aimé, ri, fantasmé, pleuré. J’ai aimé. A la folie. J’aime encore, et pour des années. C’est douloureux. Parfois trop. Souvent insupportable. Mais c’est cette douleur qui me rappelle que je suis vivante. Que j’ai eu la chance pendant toutes ces années de vivre des moments hors du commun.
Ne pas se contenter de la médiocrité. Surtout. Ne pas opter pour la facilité. Tomber amoureux, encore et encore. Pleurer. S’impliquer. Faire confiance à nouveau. Ne pas avoir peur de retomber. Dire les choses. Dire tu me manques tu sais, je sais que j’ai pas le droit de te le dire mais tu me manques et c’est comme ça. Dire je t’aime aussi. Avouer parfois que le cœur n’est pas rationnel. Qu’on devrait mais qu’on n’y arrive pas.
Je suis partie parce que l’amour, le vrai, doit être fou. Et qu’il ne l’était plus. Mais peut-être qu’un jour, quand on se reverra, au moment de se quitter, de prendre le bus, tu me prendras par la main et tu me diras viens on prend le premier avion. Viens on part très loin. On ira voir les poissons chats. Et le Kilimandjaro. Il n’y aurait que nous deux. Et la folie pour seule guide. On sautera des cascades, on fêtera non Non-anniversaires en commençant par le dessert et en fumant des cigarios. On aurait 25 ans et pas une once de maturité, 30 ans et pas de maison à nous, 35 ans et toujours pas d’enfant. Mais on aurait vu le monde, failli mourir 100 fois, fait 15 indigestions, ri à s’en briser les côtes. On serait devenus fous à lier.
Soyez fous. Profondément fous. C’est là le secret. Surprenez vous encore et encore. C’est la folie qui nous maintient vivant. Oubliez les fleurs. Le chocolat. A votre manière, soyez fous. Achetez lui des chamallows que vous ferez fondre dans des lieux improbables. Déchirez lui cette chemise que vous exécrez. Faites la danser sur la table, là tout de suite maintenant. Rangez vos parapluies et faites plutôt la course sous la pluie battante. Amusez vous bordel.
Amusez vous, c’est la meilleure façon de célébrer l’amour.
Très joli article <3
Je te souhaite une très belle journée !
A trop être dans notre train-train quotidien, tu as raison on oublie de mettre un peu de folie dans tout ça ! 20 ans que ça dure pour nous mais c’est vrai que quelque fois ça manque de folie. Tu me donnes envie d’en semer un peu plus par ci par là… Merci <3
Magnifique ! Tout simplement. Je suis sans voix et les larmes aux yeux…
J’étais de très très mauvaise humeur ce lundi matin, alors ton commentaire tombe à pic, je me dis que finalement ce lundi ne va pas être si merdique 🙂
Merci pour ton passage, ça me fait très plaisir!
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Quel texte magnifique, il me touche tant que j’en ai les larmes aux yeux. Ne jamais oublier de vivre. L’ennui est mortel !!! Dans la vie perso, comme dans la vie pro (qui est perso aussi… ). Bisous et merci pour cette poésie. Et j’ai très envie de découvrir “En attendant Bojangles”.
Merci merci pour pour ce commentaire, tu n’imagines pas à quel point ça égaie ma journée 🙂
Pas toujours facile de parler “vrai”, et encore moins de s’exposer au jugement, à la critique, de s’exposer tout court même. Alors ça me fait très plaisir tes jolis mots posés là, tout doux, comme le soleil matinal 🙂
A très bientôt!
Merci Sarah qui mène sa fraise ! Je découvre votre joli texte poétique plus d’an an après sa publication. Mais qu’importe, il restera intemporel de toute façon. En tout cas, il résonne en moi, profondément. Oui, vous avez les mots justes pour dire combien la vie ne vaut d’être vécue sans amour, avec un grand A. L’Amour est l’essence de notre humanité. Alors, mille mercis de l’avoir dit le plus joliment du monde et de m’avoir emmenée loin dans mes rêveries. Bonne continuation à vous !
Merci beaucoup Nath (alie?) ton commentaire me touche, surtout dans un moment ou je n’ai plus forcément le temps/la motivation d’écrire, et que je viens de plus en plus rarement par ici, cela fait toujours plaisir aux yeux et au coeur de trouver par hasard un message comme le tien…
Alors encore merci, et je te souhaite une belle semaine!
A bientôt
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Manuela